Nous sommes tous des féministes

 "Féministe : une personne qui croit à l'égalité sociale, politique et économique des sexes."*

Je viens de lire ce petit texte de 50 pages Nous sommes tous des féministes de Chimamanda Ngozi Adichie d'une traite. Ce livre sur le féminisme m'a été offert par un homme, mon grand-père. Il est férocement bien écrit, il reflète parfaitement ces petites injustices quotidiennes que vivent les femmes, même en 2016, même en occident (l'auteure est nigériane et a longtemps vécu aux États-Unis). Mais il faudrait être heureuses, car finalement il n'y a plus de vraie discrimination envers les femmes dans nos société occidentales. Ah bon?
Si je décide de ne pas me marier, ne pas avoir d'enfant et de me consacrer uniquement à des objectifs personnels et professionnels en tant que femme je vais être jugée différemment d'un homme.
Si je fonde un foyer, avec un homme et que nous avons des enfants et que je suis le pilier de ce foyer, que je prends les décisions importantes, que je le finance, mon homme sera qualifié de demi-homme et moi de castratrice.
Si j'ai un métier à responsabilité, que je mène la barque exactement comme n'importe quel homme le ferait : avec fermeté, intransigeance, autorité, que je réprimande mes subordonnés indisciplinés, ce comportement risque de m'apporter des ennuis : une femme n'agit pas ainsi.
Si les hommes de passage dans mon lit changent régulièrement, je ne serais qu'une salope, lorsque mon homologue masculin sera un Don Juan.
Si je me mets en colère, parce que ces inégalités me font rugir, parce que je ne suis pas d'accord avec les uns ou les autres, ou parce que simplement je suis fatiguée, on me demandera si j'ai mes règles.
Non je n'ai pas mes règles, mes hormones, mon utérus et mes ovaires vont bien, rassurez vous. C'est mon cerveau qui parle. Cerveau parfaitement identique à celui d'un homme, qui pense, analyse, et construit la réflexion de la même manière. Et ce qu'il dit est simple : chaque fois qu'une réflexion que vous faites à une femme (que vous soyez vous-même un homme ou une femme, peu importe) parce que c'est une femme, c'est-à-dire une réflexion que vous n'auriez jamais idée de faire à un homme, abstenez vous. J'en ai assez de ces conseils qu'on me donne parce que je suis une femme, ces hommes qui viennent m'aider à faire mon créneau alors que je ne suis même pas en train de peiner pour le faire, ces gens qui m'expliquent comment je devrais m'habiller ou non lorsque je sors seule tard le soir, les endroits où il est convenable ou pas que j'aille accompagné, les ambitions que je dois ou non avoir, le fait que je serais une "castratrice"  de part mon comportement de révoltée et d'insoumise, ceux qui m'expliquent que je dois faire attention à ce que je fais de mon corps, parce que ma réputation pourrait être salie,.. Un jour un homme que je conduisais en covoiturage m'a dit "tu conduis bien, tu conduis comme un homme." Non je ne conduis pas comme un homme... je conduis, je mange, je baise, je dors, je travaille, je ris, je me mets en colère, j'écris, je me révolte, je pleure, j'aime, je danse, je chante, j'écoute, je lis et je VIS, comme une femme qui a été élevée comme un être humain ne pouvant être limité dans ses actions sous prétexte de son sexe.

"Pourquoi faut-il qu'il s'agisse de vous en tant que femme ? Pourquoi pas de vous en tant qu'être humain?" Ce type de question est une façon de réduire au silence une personne et son expérience propre. Je suis un être humain, bien sûr, mais il m'arrive un certain nombre de choses en ce monde parce que je suis une femme."*

Je suis féministe, et ce n'est pas un gros mot. J'ai grandi entourée de personnes qui le sont, hommes et femmes confondus. Je crois qu'il n'y a pas eu de différence d'éducation entre mon grand frère et moi. Ou plutôt, les différences n'étaient pas liées au fait que nous ne soyons pas du même sexe, mais au fait que nous sommes deux personnes différentes, deux humains singuliers. Mes grands-pères ont toujours eu un attitude féministe (pour ce que j'en sais) à mon égard, comme à celui de toutes les femmes qui les entouraient dans leur vie personnelle et professionnelle. J'ai découvert très tardivement que les familles où la femme faisait l'ensemble des tâches ménagères, parce que la tradition veut que ce soit comme ça, n'était pas un vieux mythe, mais une réalité dans beaucoup de familles. Pas dans la mienne. Aujourd'hui c'est mon père que j'appelle lorsque je suis énervée d'avoir été rappelée à ce qui est sensé être ma place de femme. Comme la semaine dernière, ces hommes qui m'ont dit plusieurs fois d'être prudente lorsque j'ai réagi à une situation qui m'indigne, parce que "c'est dangereux" et que je "pourrais être blessée". J'étais bien plus énervée de ces commentaires qu'on ne m'aurait jamais adressé si j'avais été un homme, que de la situation à l'origine de ma réaction. Je ne suis pas un être fragile, je ne suis pas un petit lapereau perdu qui ne sait pas comment faire face à la vie et qui agit donc selon de bas instincts d'animaux, faute de mieux. Je suis un être humain, j'ai la chance d'avoir reçu une éducation complète, d'avoir appris à analyser et réfléchir. Je sais donc réagir avec prudence et intelligence. Je n'ai pas besoin d'un homme pour me dire ce que je dois faire ou non, j'ai besoin des Hommes pour partager et m'enrichir. Je suis un Homme comme les autres.

"Pour ma part, je considère comme féministe un homme ou une femme qui dit, oui, la question du genre telle qu'elle existe aujourd'hui pose problème et nous devons le régler, nous devons faire mieux. Tous autant que nous sommes, femmes et hommes."*

"Vous imaginez à quel point nous serions plus heureux, plus libres d'être nous mêmes, sans le poids de ces conventions."*

*Citations issues du livre Nous sommes tous des féministes de Chimamanda Ngozi Adichie (livre reprenant une conférence TEDxEuston de 2012 de l'auteure).

Commentaires

Articles les plus consultés