Portrait #4 - Dede - Femme d'exception

Dans la vie, on cherche tous des modèles, des personnes auxquelles on aimerait ressembler, des personnes dont la force et la personnalité forcent l'admiration. Ma grand-mère est de ces femmes, de celles qui ne laissent personne indifférent, de celles qu'on observe avec fierté et admiration.

Ma grand-mère, Denise est née d'une mère institutrice et d'un père inconnu en 1940. Elle a vécu la guerre les premières années de sa vie, la résistance de sa mère, l'exode. Elle vivra aussi le statut de fille sans père, de bâtarde, dans la campagne française des années 1940 et 1950. Par pudeur et parce qu'elle ne dit pas ses blessures, elle ne nous a jamais raconté les détails du traitement qu'on pouvait réserver à une petite fille dont la mère à eu l'affront de disposer de son corps, d'avoir une vie sexuelle hors du mariage et de tomber enceinte. Elle ne nous l'a jamais dit, pourtant j'ai entendu entre les lignes que ce n'avait été ni marrant, ni facile.
Denise, elle raconte les histoires de sa jeunesse dans ce qu'elles ont de drôles et romanesques. On lui a demandé un milliard de fois les histoires de quand elle était petite, sans jamais se lasser de ce qu'elle avait à nous raconter. 

En 1944, la guerre se termine, les soldats défilent fièrement dans les rues françaises. C'est l'euphorie en France. Denise a 4 ans et un soldat lui propose de monter dans un char. Elle est belle, les cheveux bruns frisés et porte sa redingote du dimanche pour l'occasion. Elle s'assoie et profite de ce moment extraordinaire dont elle se souvient plus de 70 ans après. En sortant elle constatera avec horreur que sa tenue du dimanche est toute noircie de la crasse ambiante du véhicule de guerre. Elle nous racontera mille fois la panique d'une petite fille qui tâche ses si précieux habits du dimanche, ceux dont on doit prendre très soin car on n'en a qu'un à la fois et pas les moyens d'en avoir d'autres. 

Très vite, Denise sera une jeune fille insoumise, rebelle et parfois un peu provocatrice. A l'école Normale elle fera tourner en bourrique la surveillante en cheffe avec ses camarades. Elle tentera une expérience d’électricité dans le labo de physique qui fera sauter les plombs du bâtiment et elle accusera un fer à repasser pour ne pas se faire houspiller par les responsables. Elle apprendra plus tard que le réparateur a fait payé très cher la réparation d'un fer qui n'avait rien fait sauter du tout.

Denise deviendra institutrice, puis directrice d'école. Ma grand-mère à toujours dit ce qu'elle pensait sans se soucier du statut de celui a qui elle avait à faire. Les inspecteurs de l'éducation nationale ayant eu à la rencontrer s'en souviennent sans aucun doute. Ils se souviendront aussi ne pas l'avoir vu à sa propre remise des Palmes Académiques. Ils se souviendront avoir reçu par courrier tous les poux qu'un enfant avait sur la tête car, selon eux, "ça n'était pas si grave". 
Mais si l'on se souvient autant d'elle c'est avant tout pour son dévouement aux autres.

Denise c'est une femme, une sœur, une mère et une grand-mère d'exception. Pas une fois je ne l'ai vu baisser les bras. Pas une fois je ne l'ai entendu dire non lorsqu'on avait besoin d'elle. Pas une seule fois je ne l'ai vu laisser tomber quelqu'un dans le besoin. Ma grand-mère a donné sa vie aux autres, les enfants fragiles dont elle a été la maîtresse adorée continuent d'aller la voir pour trouver l'amour qu'elle ne refuse à personne. Parfois un peu abrupt, dure et directe, elle reste tout de même celle qui donne sans compter. Elle est celle qui joue avec les enfants, leur lit des histoires et leur prépare les meilleurs goûters du monde. Elle est celle qui donne de son temps à chacun, qui n'a pas peur d'aller au front pour défendre ceux qui ne peuvent pas le faire. Elle donne, elle donne et son énergie parait inépuisable. Elle porte en elle autant d'angoisse que d'amour et vit chaque journée avec pour mission personnelle de garder en bonne santé ceux qu'elle aime. Elle aimerait avoir le pouvoir de nos protéger partout où l'on est, quoi que l'on fasse.

On s'est tous un peu disputés avec notre Dede, on lui a tous un jour dit qu'on était des adultes, qu'on n'avait pas besoin de son avis sur nos choix. Mais on est tous aussi allés chercher de l'aide et du réconfort chez elle. On est tous allé la voir pour qu'elle résolve un problème, qu'elle fasse pour nous ce qu'on n'arrivait pas à faire nous-même, pour qu'elle nous prennent dans ses bras, soigne nos blessures et nous donne de sa force.
Chaque jour, elle a une pensée pour nous et c'est là notre trésor.

Ma grand-mère n'est pas qu'une grand-mère exceptionnelle, c'est avant tout une femme hors du commun qui a marqué tout ceux qui ont croisé sont chemin. C'est une femme solide et forte. 
Ma grand-mère on l'aime tant... mais on ne lui dit que peu souvent. 

Ma Dede chérie, je t'aime terriblement fort.

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